17 mars 2010

Regain 2


Ce tableau est une commande. Il s'agissait de faire plaisir à une personne en particulier, Françoise H. J'ai cherché un texte, un univers littéraire qui rende hommage au travail du paysan, à la terre. J'y ai beaucoup réfléchi, j'ai beaucoup cherché dans notre littérature et j'ai peu trouvé. La solution est venue du cinéma, d'une image que j'ai gardée d'un film vu dans mon enfance, Regain, où  Orane Demazis et Gabriel Gabrio se tiennent devant la colline labourée, Orane Demazis en attitude de semeuse. Le texte est la fin du livre de Giono. Au-delà de la beauté littéraire particulière de ce final, le livre en entier emporte le lecteur dans un mouvement profond, venu des origines. Le propos est servi par une langue magnifique.

Format : 60x40
Technique : médium enduit, pigments, acrylique noire grattée, collage de papyrus, feuille d'or. Plumes carrées, plume J.





« Il est devant ses champs. Il s’est arrêté  devant eux. Il se baisse. Il prend une poignée de cette terre grasse, pleine d’air et qui porte la graine. C’est une terre de beaucoup de bonne volonté.
 Il en tâte, entre ses doigts, toute la bonne volonté.
 Alors, tout d’un coup, là, debout, il a appris la grande victoire.
 Il lui a passé devant les yeux, l’image de la terre ancienne, renfrognée et poilue avec ses aigres genêts et ses herbes en couteau. Il a connu d’un coup, cette lande terrible qu’il était, lui, large ouvert au grand vent enragé, à toutes ces choses qu’on ne peut pas combattre sans l’aide de la vie.
 Il est debout  devant ses champs. Il a ses grands pantalons de velours brun, à côtes ; il semble vêtu avec un morceau de ses labours. Les bras le long du corps, il ne bouge pas. Il a gagné : c’est fini.
 Il est solidement enfoncé dans la terre comme une colonne. »

                                                                                   Jean Giono

Cette interprétation du texte privilégie la terre, la fécondité de la terre. Je pense à une poignée de terre brune et grasse que j'écrase dans ma main, je pense au mot "emblavure".


 J'ai donné une seconde interprétation de ce texte, plus austère, centrée sur l'homme, sur sa transformation. Les deux répondent à mon sens au texte, le choix intervient ensuite sur ce qui résonne chez le spectateur, sans comparaison de valeur. On peut en effet voir dans ce texte comment l'homme par son labeur rend la terre féconde, mais aussi comment le temps du labeur et le temps de la terre transforment l'homme, lui donnant un surcroît d'humanité.
La destinataire du tableau a eu le choix entre les deux versions et a choisi celle de la fécondité, qui à mon avis lui convenait, qui à l'origine était vraiment pensée pour elle.


2 commentaires:

  1. la Fanchon du Courtil28 mars 2010 à 21:57

    Merci, Elisabeth, pour ce tableau magnifique et plein de sens et essentiellement de celui que j'ai toujours essayé de donner à ma vie.
    Debout, admiratif, les pieds rivés dans sa belle terre labourée, mais taiseux, et le regard tourné vers notre avenir, tel était mon père.
    La Granny d'Anna et Félicie

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  2. La Fanchon du Courtil28 mars 2010 à 22:07

    Merci Elisabeth,pour ce tableau magnifique et plein de sens et essentiellement de celui que j'ai toujours essayé de donner à ma vie.
    Debout, admiratif, les pieds rivés dans sa belle terre labourée, mais taiseux, et le regard tourné vers notre avenir, tel était mon père.
    La Granny d'Anna et Félicie

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